Les pluies
Il pleut et ça ne rime à rien ce puits sans fond de pluies de saison.
Elle sort nu-pieds et ventre à l’air sous le gris pull élimé. Quel bout de laine tirer de ces jours délavés ?
Que faire du dedans, du dehors ?
La pluie de mai fait frissonner toutes ses peaux découvertes. Plus de place pour les amours d’hiver. L'averse a d’autres divagations.
Un temps périt, l’autre naît.
Il faut attendre.
Accepter l’ennui.
Se laisser gagner par le froid, la fluidité, l’absence.
Etre eau. Etre ce déluge déferlant sur les murs défraîchis de la ville : rues lavées à grandes eaux, pieds trempés, têtes blotties sous parapluies bigarrés. Colonies de bêtes à bon dieu aux couleurs publicitaires, fendant vaillamment les flots menus des eaux stagnantes.
Nettoyage de printemps. La ville entière passe au lavoir du ciel et se laisse frapper par cette volonté laveuse, cette rage à faire disparaître les nappes huileuses, les ramassis nauséeux. Ciel grisé par l’envol des verts : cascades de façades à vestes de lierre, torrents orgueilleux de végétal triomphant. Le vert est partout ; envahit chaque bout de terre, squatte tout bitume à l’agonie.
Alors être eau. Passe-murailles de pluie fine. Laisser le ciel verser ses larmes de joie.
Et attendre.
Attendre les crues tempétueuses. Les orages désirés.
La pluie d’été.